Mors Ultima Ratio ! C’est-à-dire que la mort est la raison finale de Tout. Ainsi, s’exclamait un philosophe grec rendant ainsi hommage à un grand bâtisseur de la Cité à l’occasion d’une élégie post mortem.
Dans le même sillage des grands hommes qui ont fait l’histoire de leurs peuples et dont les noms sont désormais inscrits à jamais sur du marbre aux frontons de leurs sépultures, Abdoulaye Elimane DIA vient de les rejoindre au panthéon de la gloire et des honneurs, à eux rendus, pour l’œuvre incommensurable qu’ils viennent de léguer à la postérité.
Finalement donc, l’on ne pourra jamais s’habituer à la mort ; cette grande faucheuse, tant elle demeurera toujours mystérieuse, sublime et étouffante surtout lorsqu’elle frappe un être qui vous est cher, à plus forte raison un être valeureux et utile à sa communauté, une personnalité d’envergure, un homme affable d’une urbanité exquise et dont les qualités intrinsèques étaient unanimement connues et reconnues de tous.
Impassible devant la mort, nous voici aujourd’hui au bord d’un vide quasi cosmique, puisque nous cherchons partout le visage que nous avons perdu ; car il était des nôtres et nous avons perdu cette part de nous-mêmes.
C’est connu, la mort est l’éternel paradoxe, le sublime équinoxe, le dernier voyage à accomplir.
Elle vient de nous ravir l’as de pique, l’espoir et l’espérance de toute une jeunesse en devenir, l’alpha et l’oméga de toutes les sollicitudes et des sollicitations, l’archétype achevé de la générosité et du don de soi dans son engagement à servir sa communauté, une icône irréfragable comme identité remarquable dans le Département de Podor d’abord et au niveau national où sa disparition n’a laissé personne indifférent.
A présent, nous voici seuls, ébahis et stupéfaits, nos lèvres serrées, dans un silence assourdissant qui hurle au gré de nos pas qui s’arrêtent.
Hélas ! Telle est la quintessence et la finitude asymptotique qui sépare la vie et la mort. Un être humain qui s’éteint, ce n’est pas un mortel qui finit, c’est un immortel qui commence.
Abdoulaye Elimane DIA, il restera de toi, de ton jardin secret, les souvenirs de tes bonnes actions, ta générosité légendaire, ce que tu as donné et offert fleurira, ta raison d’être te survivra car il restera de toi ce que tu as semé et en d’autres, germera l’idéal dont tu as toujours cru et professé du haut de ton piédestal.
Abdoulaye Elimane DIA, s’est retiré dans la plus grande dignité après une vie bien remplie, un vécu irréprochable tant dans le parcours que dans le discours dont le lien et le liant renvoient toujours à une posture hautement pédagogique alliant humilité, intelligence et méthode.
Il était d’une grande courtoisie adossée à un savoir vivre, trait dominant d’un caractère trempé dans l’appropriation de valeurs cardinales à la hauteur d’un humanisme socle d’une philosophie de vie assumée pleinement et entièrement.
Patriote dans l’âme, il était à l’avant-garde de tous les combats qui promeuvent le développement socioéconomique des terroirs à partir de leurs potentialités hydroagricoles, sylvopastorales et halieutiques.
Après le désenclavement effectif de l’Ile à Morphil, il travaillait ardemment et constamment à l’instauration de partenariats gagnant-gagnants, viables, équitables et durables dans l’exploitation du potentiel foncier du Département de Podor à travers des investissements structurants, expression qui revenait couramment dans son propos lors de ses nombreuses interviews.
Département de Podor, Californie et grenier de Sénégal, c’était son rêve.
Il était le modèle achevé d’un patriote sincère et altruiste, un nationaliste intraitable dans la défense des intérêts du Sénégal, un grand militant de la préférence nationale dans le développement des entreprises privées seules garantes d’une croissance soutenue et non extravertie.
Orfévré dans la conception de solutions intelligentes et de la sagesse dans leur mise en œuvre, il était doué d’une intelligence raffinée, éclectique, toujours pétillante, structurée et efficace avec des approches novatrices adaptées à toute situation prégnante.
Il avait la puissance du verbe mesuré et constructif enrobé dans la beauté du mot juste.
Abdoulaye Elimane DIA, du ciel de Oréfondé sous lequel les nuages dessinent des licornes et des acacias, ton corps repose si loin de tes siens, mais ton âme si près, nous ne manquerons jamais de chérir l’image de toi dans le pré d’or circonscrit dans le coin écologique de bois à côté d’érudits, de saints et d’hommes de dieu.
Oui, Oréfondé, la mystérieuse, la glorieuse, où séjourna le saint homme Cheikh Oumar Foutyou dans ses retraites spirituelles, lieu géométrique où se rencontrent les effluves mystiques et transcendantaux, ligne médiatrice aux confluents des terroirs culturels du Fouta, git ta tombe auprès de celle de ton père auquel tu ne t’es jamais séparé.
Ta sépulture ainsi définitivement figée dans le temps et dans l’espace, au cœur du Bosséa, épicentre des Départements de Podor et de Matam, constitue à la fois le symbole et la symbolique de ton parcours, de ta trajectoire, marqués par ton envergure incommensurable, ta personnalité immense, hétéroclite et atypique à travers les différentes interactions sociales et sociétales que tu entretenais avec l’ensemble des populations du Fouta.
C’est pourquoi, à présent, le peuple Haley bée a bien compris ton choix.
Et la terre de Démette ton village natal, à travers les ondes sismiques, propage et respire ton souffle incandescent, nonobstant l’absence physique de la pierre tombale qui t’ensevelit à jamais loin de ton terroir auquel tu avais fait don de ta personne en l’irrigant de toutes les opportunités qui charrient prospérité et bien être.
Par ta prestance, ton envergure, ta visibilité macroscopique et universelle ; par ton image, tu as su placer la Commune de Démette et le peuple Haley bée au firmament de la gloire et de la célébrité.
Abdoulaye Elimane DIA, grand timonier né d’une belle étoile, l’étoile polaire qui oriente sans faillir, encore moins vaciller en brillant dans toute sa splendeur, vient de tirer sa révérence en laissant toute une communauté en apnée, j’allais dire tout le pays, orpheline et désemparée, tant sa disparition a été brutale et inattendue.
En effet, malgré sa courte mais pleine et dense vie durant laquelle l’horloge divine pendulaire et synchrone égrainait les différentes séquences temporelles de ses œuvres, avant de s’arrêter brusquement un mémorable 5 aout 2021, Abdoulaye Elimane DIA a été le parfait prototype d’un leader adossé à de fortes convictions avec une vision claire et concise autour d’un idéal de société qu’il a su mettre en œuvre dans un pragmatisme à la hauteur d’une ambition au service exclusif de sa communauté et au-delà.
Abdoulaye Elimane DIA, parangon achevé et modèle par excellence de toute une philosophie de vie, l’incarnation de toute une pédagogie par l’exemple et l’exemplarité, grand bâtisseur non pas seulement de la Cité, a su mettre en cohérence et en synergie les trois dimensions que constituent le développent socioéconomique des terroirs à travers leurs potentialités, la dimension culturelle et cultuelle du développement et la nécessité absolue de développer le capital humain gage salvateur et indispensable dans l’instauration d’un développement durable.
Abdoulaye Elimane DIA, dans ses œuvres sociales et humanitaires, a pu trouver les mécanismes d’ancrage d’une conscience citoyenne autour des valeurs de travail, de morale et d’éthique, mais surtout des valeurs de solidarité et de partage.
Son altruisme et sa sollicitude constante à l’endroit des populations nécessiteuses, ses actions multiformes et variées dans le domaine social et religieux, son engagement sacerdotal et effectif dans l’éradication de la pauvreté, étaient son bréviaire, son vadémécum de tous les jours, ses principales préoccupations.
Abdoulaye Elimane était dépositaire d’une générosité sans commune mesure avec un sens inné du partage, mais surtout l’incarnation du culte du travail bien fait auquel il s’adonnait pleinement en invitant la jeunesse à s’inspirer de son expérience et de sa trajectoire.
Kalaadio, comme on l’appelait affectueusement ; sobriquet identitaire rendu célèbre par le grand artiste chanteur Baba Mall à travers une chanson mythique et lyrique, à lui dédié, devenu aujourd’hui un hymne à sa gloire comme bréviaire de sa philosophie de vie, avec des déclinaisons acoustiques et harmoniques envoutantes, s’est éteint dans la surprise générale tant l’homme fascinait à travers son œuvre immense et sa forte personnalité dans toute sa grandeur et de l’espoir placé en lui dans le portage des enjeux, des mutations et des défis de l’heure.
Mais comme l’énonçait un penseur, l’inévitable n’arrivant jamais, c’est donc l’inattendu qui surprend toujours.
La disparition brutale de Abdoulaye Elimane DIA, comme celles de valeureux fils du Sénégal, nous invite à une introspection, que finalement seul ALLAH SWT, Maitre des destins, reste et demeure l’Omnipotent, l’Omniscient, le Miséricordieux.
Allahoumma agfirlahou wa rahmahou.
Mamadou Ndiaye DIA
Ancien Chargé de Programmes UNESCO
Président Commission Education Formation
Commune de Démette
