PORTRAIT. Qui est Joe Biden, l’homme qui a fait chuter Donald Trump ?

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(FILES) In this file photo taken on October 29, 2020 Democratic Presidential candidate and former US Vice President Joe Biden gestures prior to delivering remarks at a Drive-in event in Coconut Creek, Florida. - Joe Biden has won the US presidency over Donald Trump, TV networks projected on November 7, 2020, a victory sealed after the Democrat claimed several key battleground states won by the Republican incumbent in 2016. CNN, NBC News and CBS News called the race in his favor, after projecting he had won the decisive state of Pennsylvania. His running mate, US Senator Kamala Harris, has become the first woman US Vice President elected to the office. (Photo by JIM WATSON / AFP)

Cinquante années… et les interminables heures de comptes de milliers de bulletins de votes, c’est au terme d’un marathon qui semblait jamais ne devoir se terminer qu’à 77 ans, Joz Biden va pouvoir enfin s’installer dans le bureau ovale de la Maison Blanche qu’il a si longtemps fréquenté, mais pas dans le bon siège. Il va ainsi devenir le président le plus âgé jamais élu aux
États-Unis. Des cheveux blancs et une démarche parfois chaloupée. Mais aussi une longue expérience qui lui a donné une sorte de force tranquille et de sagesse. Dans ce pays haché menu par une campagne d’une rare violence, et après quatre années du règne plein de bruit et de fureur d’un manitou manipulateur, on en aura grand besoin.

« Nous pouvons mettre fin à cette présidence qui, depuis le début, a cherché à nous diviser, à nous déchirer », a lancé, dans les dernières heures de sa campagne, l’ancien vice-président. « Nous pouvons mettre un terme à une présidence qui n’a pas su protéger le pays, qui a soufflé sur les flammes de la haine ».

Tous les extincteurs vont donc fonctionner. « Joe l’endormi » comme le surnommait cruellement Donald Trump est désormais « Joe le pompier ».

Qui est donc le 46e président de la nation la plus puissante du monde ? Un Américain type, pourrait-on dire. Une partie de sa famille, du côté de sa grand-mère maternelle, serait d’origine française, des huguenots tout d’abord réfugiés aux Pays-Bas, puis aux Etats-Unis. Du côté de son père, ce sont des catholiques irlandais, une religion à laquelle Biden reste toujours très attaché. Même s’il n’est pas anti IVG et plutôt pour le mariage gay, il prie chaque dimanche à l’église Saint-Joseph de Willmington, en Caroline du Nord.

Joseph Robinette (un petit nom charmant !) Biden naît donc le 20 novembre 1942 à Scanton en Pennsylvanie. Son grand-père était un industriel qui avait fait faillite, son père était vendeur de voitures, et les aléas de la vie vont faire voyager la famille. Lui fait de brillantes études de droit et de sciences po. Encore étudiant, il fait la connaissance de Neila, qui devient son épouse. Ils ont trois enfants. Il entame une carrière politique qui s’annonce sous les meilleurs auspices. À l’automne 1972, il est élu pour la première fois sénateur. Tout semble lui sourire. Tout bascule en décembre 1972. Sa femme Neila roulait en voiture avec les trois enfants, lorsqu’un chauffard ivre leur coupe la route. Neila est tuée sur le coup, ainsi que sa plus jeune fille, Naomi, âgée de 13 mois. Les deux garçons du couple, Beau et Hunter s’en sortent tout juste, grâce à l’intervention rapide et efficace des secours. Joe Biden aura toute sa vie, une reconnaissance infinie pour les pompiers. Un terrible coup dur. Et aujourd’hui encore, les Américains s’en souviennent. Et savent que Joe Biden ne connaît que trop bien les douleurs du deuil. Et les bienfaits de la
compassion.

Il va se remarier, cinq ans plus tard, avec son épouse actuelle, Jill : ses deux garçons, malgré leur jeune âge, voulaient cette union. Le nouveau couple aura une fille, Ashley, née en 1981. Son fils Beau sera tout d’abord militaire, il participera à la guerre en Irak, puis deviendra procureur général du Delaware. Là encore, le destin frappe avec férocité : Beau meurt en 2015 d’un cancer du cerveau. Joe, lui poursuit sa carrière. Avec des hauts et avec des bas. Lui, qui, tout jeune était bègue, s’emmêle parfois les crayons dans ses discours. Il est coutumier des gaffes. Parlant de la Grande-Bretagne, il confond Theresa May et Margareth Thatcher. Il commence un discours en déclarant enthousiaste qu’il aime le Vermont, alors qu’il est dans le New Hampshire.

Plus gênant : en 1991, une jeune magistrate accuse son supérieur de harcèlement sexuel. Joe Biden, à l’époque, ne se montrera pas des plus féministes à son endroit. Des réflexions peu glorieuses, qui ont refait surface quelque trois décennies plus tard, à l’heure de #Meetoo. On dit
aussi qu’il a parfois eu la main baladeuse : un vilain défaut que curieusement, Trump n’a jamais eu l’idée d’évoquer, lui qui d’ordinaire ne se gêne pas.

Petit à petit, dans la galaxie démocrate, Joe Biden va prendre la place d’un éternel compagnon sage et fidèle. Il est trop vieux pour les uns, trop mou pour les autres, trop centriste pour les plus bouillants. Il fait son bonhomme de chemin. Il s’intéresse de près aux affaires étrangères, sera
partisan de l’intervention en Irak.

Il est écarté de la course à la Maison Blanche une première fois, en 1988 puis une deuxième fois en 2008. Cependant, Barack Obama fait de lui son vice-président. Et autant ces deux hommes s’étaient opposés avant la présidence, autant ils ont travaillé main dans la main, pendant deux mandats, sans anicroche. Barack Obama était un très jeune sénateur, peu expérimenté, parfois raide. Biden lui a apporté l’expérience, la souplesse, une connaissance parfaite de la mécanique du pouvoir.

Face à Trump, son heure est donc venue. Il avait été écarté en 2016 au profit d’Hillary Clinton. Si celle-ci s’est cassé les dents face à un Trump imprévisible et démagogue, c’est parce qu’elle représentait « l’establishment » que détestent bon nombre de Yankees. Biden, malgré une longévité exceptionnelle en politique, ne suscitait pas le même sentiment de rejet. Personne ne l’admire, ne l’adore, ne le vénère, mais personne ne le déteste. Tout le monde le prend – malgré quelques casseroles en aluminium et peu sonores – pour un honnête homme. Après s’être embrouillé avec Kamala Harris, il la choisit comme vice-présidente, donnant accès à ce poste à une femme afro-américaine pour la première fois de l’histoire du pays. Désormais, la tâche est immense pour « Joe l’endormi » pour apaiser un pays meurtri. De quoi perdre le sommeil !

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