Maître-mot de la Politique nationale en matière d’accès aux services d’eau et d’assainissement : l’élimination des disparités. Quoi de plus normal pour célébrer la Journée Mondiale de l’Eau ce 22 mars 2019 sous le thème : « Ne laisser personne de côté » ? L’accès universel est l’objectif fondamental. Pour cela, d’importants efforts sont consentis dans la réalisation d’ouvrages. Revue des actes et des perspectives dans ce document.
Monsieur le Ministre, par rapport au thème de la Journée Mondiale de l’Eau « Ne laisser personne à côté ». Quels sont, selon vous, les principaux leviers d’appui du Gouvernement pour prendre en charge ce défi ?
La Journée Mondiale de l’Eau a été instituée depuis 1993 par l’Assemblée générale des Nations Unies à travers ONU Eau – l’entité qui coordonne les travaux de l’ONU liés à l’eau et à l’assainissement – pour permettre à la communauté internationale de célébrer chaque année les efforts déployés par l’humanité pour instaurer une gestion efficace des ressources en eau vers la satisfaction des différents usages. Dès son avènement à la magistrature suprême, Son Excellence Monsieur Macky Sall, Président de la République, a fixé la priorité pour un accès équitable à l’eau potable à tous les citoyens. Cette vision a été ensuite traduite dans le Plan Sénégal Emergent en son axe 2, Développement du Capital humain et déclinée en objectif spécifique d’accès universel durable à l’eau potable en 2030.
Spécifiquement pour le milieu rural, quels sont les efforts déployés par le Gouvernement depuis l’avènement du Président Macky Sall pour atteindre l’accès universel à l’eau potable ?
Le Sénégal a atteint la cible Eau des OMD pour le milieu rural dès 2014 avec une performance de 84,2% pour une cible de 82% qui était fixée pour l’échéance de 2015 ; ce qui démontre des efforts réels déployés dans ce domaine. Durant la période 2012-2019, on estime à 1.600.000 personnes la population additionnelle desservie à l’eau potable à travers les nouvelles infrastructures et équipements mis en place dans le cadre des projets du PEPAM y compris le programme des 300 forages, des autres projets d’hydraulique post-PEPAM, des deux phases du PUDC exécutées avec l’appui du PNUD et du PUDC 3 mis en œuvre actuellement par l’OFOR. En termes de réalisations, sur la même période, on a enregistré 717 forages profonds (neufs, renouvelés et réhabilités), 20 unités de potabilisation, 363 pompes à motricité humaine, 430 châteaux d’eau et au moins 1.035 équipements de pompage. Au plan de la distribution de l’eau également, les résultats sont très satisfaisants avec la réalisation d’au moins 8.500 kilomètres de canalisations, de 6.978 bornes fontaines, de plus de 12.500 branchements domiciliaires et de 735 abreuvoirs qui ont permis de desservir au moins 5.000 localités.
Toutes ces réalisations ont ainsi permis au Sénégal de faire passer le taux d’accès amélioré en milieu rural de 81,2% en 2012 à plus de 93% en fin 2018.
Quels sont les défis immédiats auxquels notre pays devrait face dans ce domaine précis ?
Les principaux challenges que le Gouvernement est en train de prendre en charge sont relatifs à l’amélioration de la qualité de l’eau, sa disponibilité et son accessibilité. Pour ce qui concerne la qualité de l’eau surtout du point de vue physico-chimique, il faut relever que certaines parties du pays, notamment la bande centrale et un peu au Sud-Est, présentent des excès de chlorures, de fluor ou de fer qui impactent sur les services fournis aux ménages. Et à ce titre, des initiatives importantes ont été menées avec succès, notamment le projet de transfert d’eau de l’axe Notto-Ndiosmone-Palmarin avec un investissement de l’ordre de 18 milliards FCFA qui permet aujourd’hui d’améliorer nettement la qualité de l’eau au profit d’une population de plus de 400.000 habitants. Ces expériences de transfert d’eau seront renforcées à travers le concept d’«autoroutes de l’eau» qui vont certes devoir mobiliser des ressources financières importantes à l’investissement, mais auront l’avantage d’être très efficientes à l’exploitation et surtout vont permettre de prendre en charge le problème globalement à la fois pour les réseaux urbains et ruraux. Parmi ces initiatives, on peut citer les transferts d’eau depuis le triangle Khombole-Touba Toul-Kabadiack, les sites de Sadio et de Malem Hoddar, le bassin de la Sine-Gambie, etc.
En termes d’accessibilité, nous allons intensifier les programmes de branchements à l’eau potable avec une bonne dose de subvention afin de soutenir les ménages les plus démunis et surtout de réduire fortement les corvées d’eau qui souvent sont le lot des femmes et des filles.
Qu’en est-il pour le milieu urbain ?
La problématique de l’alimentation en eau potable de la région de Dakar est en passe d’être résolue grâce à la planification et la mise en œuvre d’un plan d’investissement ambitieux articulé autour d’un important programme d’urgence et de projets structurants. En effet, le système d’approvisionnement en eau potable de Dakar vient d’incorporer deux nouveaux centres de production : le centre de captage et de production de Bayakh, un nouveau centre de production d’eau potable d’une capacité actuelle de 17.000 m3/j ; le centre de captage et de production à Tassette à 100 kilomètres de Dakar, d’une capacité actuelle de 11.500 m3/j.
Ainsi, la mise en service des nouveaux forages de Bayakh et de Tassette a contribué à hisser la capacité de production à 419.000 m3/j contre 375.000 m3/j en 2017. Ce volume est inédit en termes de mobilisation de ressources en eau potable. La distribution de l’eau dans les différents quartiers s’est nettement améliorée depuis l’été dernier. Selon les enquêtes régulièrement effectuées par la SDE, aucun quartier de Dakar ne reste sans eau toute la journée.
Les efforts d’amélioration de la desserte en eau se poursuivent au niveau de ces centres de production de Bayakh et de Tassette où la phase 2 en cours de réalisation permettra respectivement d’apporter 15.000 m3/j et 11.500 m3/j afin de faire face à la demande à Dakar et dans ses zones d’extension.
Parallèlement à ces mesures transitoires, de grands chantiers sont ouverts, en particulier la troisième usine de traitement des eaux sur le Lac de Guiers, dénommée KMS3 et l’usine de dessalement des Mamelles. Ces deux installations stratégiques pour l’alimentation en eau potable du triangle Dakar-Thiès et Petite Côte seront fonctionnelles respectivement en 2020 et 2022 pour couvrir durablement les importants besoins en eau de cette zone.
Les populations se plaignent néanmoins parfois de problèmes de qualité de l’eau. Quels sont vos principaux projets à ce niveau ?
Le défi de l’amélioration de qualité de l’eau distribuée est bien pris en charge et en voie d’être relevé. Par exemple, la commune de Fatick vient d’être dotée d’une unité de traitement du fluor et des chlorures. Ainsi, après le renforcement substantiel de la production d’eau en 2015 dans le cadre du volet urbain du PEPAM, les habitants de cette ville ont commencé à consommer de l’eau douce depuis le mois de février 2019. C’est donc une doléance vieille de plusieurs décennies qui est maintenant satisfaite.
A Koungheul, le chantier de construction d’une unité de traitement et d’élimination de l’excès de fer, à l’origine de la couleur rougeâtre de l’eau, est en cours de finition. Toujours sous ce registre, les habitants de la banlieue de Dakar et de la Médina en particulier vont bientôt oublier cette même problématique grâce à l’érection, à Sébikotane, d’une usine de déferrisation. La ville de Kaolack figure également dans ce programme d’amélioration de la qualité de l’eau grâce à la réalisation, prochainement, de deux usines de traitement du fluor et des chlorures. Au-delà de ces villes déjà citées, la ville de Foundiougne aura bientôt son unité de traitement des eaux saumâtres après une année 2018 marquée par des difficultés réelles dans l’approvisionnement en eau potable des populations.