Macky Sall va bientôt passer 7 années au plus haut destin politique au Sénégal. Il a artistiquement réussi à conserver la dynamique unitaire dans Benno bokk yakaar pendant tout ce temps. Ce que Me Abdoulaye Wade n’avait pas réalisé avec FAL 2000 (Front pour l’alternance), qui s’est éclaté avant la présidentielle de 2007. L’actuel locataire du palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor a enregistré de nouvelles arrivées comme celles de Abdoulaye Baldé de Ziguinchor, au terme d’un rude jeu de la barbichette et Moussa Sy des Parcelles Assainies, ou encore Banda Diop de la Patte-Oie, qui a rejoint le pouvoir dans la foulée du remplacement de Khalifa Sall déchu de son poste de maire de Dakar le 31 août passé, suite à la confirmation, par la Cour d’Appel, de sa condamnation. Annoncé dans le « Macky » dès février 2018 par les cancans, Bamba Fall fait encore partie de la garde rapprochée de l’ex-maire de Dakar. Cheikh Tidiane Gadio, qui avait appelé à voter Non au référendum de 2016 et dirigé une liste aux législatives de 2017, est rentré dans les rangs, concomitamment à la procédure judicaire au centre de laquelle il a été aux Etats-Unis d’Amérique, en rapport avec ses connexions supposées ou réelles avec Idriss Déby du Tchad, sur fond de guerre commerciale inédite entre la Chine et les USA.
« Benno Bokk Yakaar, c’est la conscience que l’ère des échappées solitaires est définitivement révolue » (Macky Sall)
« Benno Bokk Yakaar, c’est la conscience que l’ère des échappées solitaires est définitivement révolue. Benno Bokk Yakaar est la conviction que la patrie prime sur les partis. Car ce qui est éternel est la nation sénégalaise édifiée par l’œuvre de chaque génération dans la longue marche, la longue et glorieuse histoire de notre pays. Benno Bokk Yakaar, c’est l’esprit du temps, parce que le temps est aux grands rassemblements, parce que le temps est à l’action, parce que surtout ce temps est le temps du Sénégal », laissa méditer le président Sall, lors de son congrès d’investiture le 1er décembre, en présence des chefs d’Etat ivoirien (venu à Dakar pour les besoins du congrès de l’Internationale libérale), mauritanien et gambien.
Passe d’armes entre Farba Ngom et Cissé Lô, retour en force de Mimi, « démission-reconduction » de Mame Mbaye Niang, seconde révolte de ABC
Cependant, Macky Sall a assisté stoïquement à la passe d’armes ramadanesque entre Farba Ngom et Moustapha Cissé Lô. La démission-reconduction, ou ce qui parait comme telle, de Mame Mbaye Ndiaye, relativement au scandale du PRODAC, a aussi secoué le landerneau, alimentant le prisme déformant sur ce qui est appelé une justice du double-standard par les contempteurs du chef de l’Etat. Le parti-locomotive de Benno bokk yakaar a, dès mars, subi les assauts répétés du médiateur de la République Alioune Badara Cissé, accusé, par le Premier ministre, d’outrepasser ses prérogatives quand il s’est escrimé à critiquer la gestion de Macky Sall. ABC finira par remettre son rapport au chef de l’Etat et depuis lors il a renoué avec son « obligation de réserve ».
2018 a été surtout marquée par le retour en force de Aminata Touré, nommée patronne du pôle parrainage de Benno bokk yakaar. Ledit parrainage, objet d’une loi à controverse, aura suscité une vive polémique entre pouvoir et opposition lors du vote de la loi y afférente en avril 2018. C’est dire qu’on se dirige vers 2019 avec un contentieux préélectoral sur fond de récusation- depuis 2017- du ministre de l’Intérieur encarté Apr. Qui plus est, le fichier électoral n’inspire pas confiance à une certaine opposition. En clair, l’Etat est soupçonné de vouloir organiser un hold-up électoral et de rompre le consensus en vigueur depuis 1992 et établi par le code Kéba Mbaye. Mamadou Diop Decroix et d’autres leaders sont gazés et empêchés d’accéder au siège du ministère de l’Intérieur où ils affectaient de tenir un sit-in le 4 septembre.
Controverse autour de la loi sur le parrainage
C’est ainsi que la Plateforme opérationnelle de sécurisation des élections (POSE) a été portée sur les fonts baptismaux par Me Mame Adama Guèye qui a renoncé à sa candidature. L’avocat a rencontré la plupart des leaders de l’opposition pour les convaincre du bien-fondé de sa démarche.
Comme pour les années précédentes, le maintien en détention de Khalifa Sall et l’exil de Karim Wade sont les points les plus saillants de la plate-forme revendicative des adversaires de Macky Sall. A cet égard, Barthélemy Dias a été arrêté par « un détachement » du GIGN armé jusqu’aux dents, devant les locaux de Dakaractu, auquel il venait d’accorder une interview, le 30 mars dernier, juste après la condamnation de l’alors maire de Dakar à 5 ans dans l’affaire de la caisse d’avance. Le maire de Mermoz-Sacré-Cœur a ainsi passé 6 mois en prison, là où son père Jean Paul Dias a rejoint le Benno en s’asseyant à la loge officielle lors du congrès d’investiture de Macky Sall.
Dakaracu, mur des lamentations
Une autre personnalité à avoir été mis aux arrêts devant les locaux de votre site préféré : le capitaine Mamadou Dièye, jeune Saint-Cyrien démissionnaire de l’Armée et désirant de s’engager en politique. C’était le 11 mai 2018.
Outre Dièye, le juge Ibrahima Dème a démissionné de la magistrature. « La magistrature est de plus en plus fragilisée, voire malmenée de l’intérieur comme de l’extérieur. Il en est résulté une crise sans précédent de la justice qui a perdu sa crédibilité et son autorité. Aujourd’hui, elle ne joue plus son rôle de gardienne des libertés individuelles, de régulateur social et d’équilibre des pouvoirs », dénonce Dème dans une lettre, à fort retentissement médiatique, publiée le 26 mars 2018.
Et Me Madické Niang tomba le masque !
Le Parti démocratique sénégalais a vécu les contrecoups néfastes d’une grande fronde amenée par Me Madické Niang, las de s’impatienter devant la perspective de l’invalidation de la candidature de Karim Wade et en l’absence d’un schéma clair de substitution. La robe noire a été propulsée sous les feux des projecteurs début septembre par des échanges épistolaires avec le Pape du Sopi. Finalement, Me Niang, candidat à la présidentielle, soutenu par Habib Sy, l’ex-directeur de cabinet du président Wade, a quitté le Pds avec d’autres leaders locaux. Cette candidature risque d’avoir un impact sur l’électorat libéral à Touba, classée jusque-là bastion du parti sopiste. Auparavant, au presque mitan de 2018, Samuel Sarr, l’ex-conseiller financier de Wade, a fait défection pour créer une formation politique se réclamant de l’héritage wadiste.
Sonko et le PUR concurrencés par Bougane, Hadjibou, Atepa…
Observant de loin ces manœuvres florentines dans l’opposition traditionnelle, Ousmane Sonko tisse sa toile et marque des points-médiatiquement s’entend- en publiant un livre-programme intitulé Solutions en septembre. Livre où il défend son projet nationaliste. Il est véhément critiqué par les affidés de Macky Sall qui jugent ses propositions irréalistes. Au lendemain de la publication de ce livre, Birahim Soulèye Diop, administrateur général de Pastef, est convoqué à la gendarmerie pour avoir animé un point de presse relativement à l’affaire de la tentative de récupération de fiches de parrainage par des policiers supposés chez la maman d’Ousmane Sonko en Casamance. En octobre, Mariama Sagna, militante dudit parti à Keur Massar, est sauvagement assassinée après un meeting dans cette commune de banlieue dakaroise. L’enquête y relative écarte la piste du complot politique évoquée par l’ex-inspecteur des impôts et domaines.
Toutefois, Ousmane Sonko et le PUR (révélation des législatives de 2017) sont menacés, dans cette 3e Voie, par l’émergence de néophytes comme le magnat de la presse locale Bougane Gueye Dani, Boubacar Camara, l’x-Pm Hadjibou Soumaré et Pierre Atepa Goudiaby, qui sont candidats à la présidentielle de 2019 pour bousculer l’ordre préétabli.
Le décès de Sidy Lamine Niasse en point d’orgue
Un autre adversaire sérieux de Macky Sall à avoir marqué 2018 : Idrissa Seck. Auteur d’un commentaire, qui aura soulevé une vive polémique, autour de la place de La Mecque dans l’histoire des religions révélées. Suscitée par Bamba Ndiaye, la polémique a été ravivée par Sidy Lamine Niass, qui nous a quittés le 4 décembre 2018. Une perte immense pour toute une nation, qui regrette la disparition de cette « voix des sans voix » qui aura écrit l’une des plus belles pages de la presse sénégalaise.
Qu’Allah l’accueille au Paradis et calme l’ardeur des démons de la violence politique !