L’affaire Fallou Sène du nom de ce jeune étudiant de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis est loin d’être close. En effet si sur le plan judiciaire la justice continue ses investigations pour voir plus claire sur le ou les auteurs de son meurtre et sur les saccages perpétrés dans les locaux du rectorat et du Crous. Sur un tout autre plan beaucoup de pistes de réflexions sont nées de cette affaire qui si elle n’est pas la première bavure conséquence du retard des paiements des bourses a, cependant provoqué une onde de choc chez la plupart des acteurs du secteur de l’enseignement supérieur qui en ont profité pour poser les vrais problèmes qu’il faut absolument régler si on veut sauver l’université au Sénégal.
En effet des nombreux acteurs qui pourtant connaissent ces problèmes depuis toujours pour les avoir vécu ont élevé enfin la voix pour disent-il montrer au gouvernement la voix du salut. Mieux vaut tard que jamais, disait l’autre.
Aujourd’hui tout le monde s’accorde pour reconnaitre qu’il y a un réel problème de disfonctionnement dans le système de gestion des bourses au niveau de la direction des bourses qui non seulement manque énormément de moyens matériel de travail et de personnel mais, pire, dans cette direction et presque sur toute la chaine l’inspection général des finances (IGF) du ministère des finances, qui a fouillé dans la gestion des bourses a décelé sur toute la chaine, de l’enrôlement au paiement, en passant par le contrôle et l’attribution, des magouilles et des mig-mag de toutes sortes attestant de la présence d’une grosse arnaque, d’un détournement des deniers publics ou en termes plus simples d’un vol bien organisé de notre argent à tous, aussi bien par des fonctionnaires que par des étudiants. Ces mots ne sont pas très forts. Tenez-vous bien dans un rapport l’IGE rapporté par le journal le quotidien dans sa publication du 22 Mai dernier que je cite « Sur 39 milliards 314 millions 909 mille francs Cfa payés l’année dernière au titre des bourses d’études, plus de 5 milliards 681 millions de francs Cfa sont allés, durant l’année académique 2016-2017, de manière indue, à des personnes qui n’avaient pas qualité d’étudiants. Le rapport de l’Inspection générale des finances qui met en lumière cette arnaque détaille même de manière précise la destination de cette somme.
Ainsi, on y apprend que 9 571 personnes, non inscrites dans aucune école ou faculté universitaire, ont pu bénéficier de 5 milliards 103 millions et quelques francs Cfa, tandis que 52 personnes en formation continue, donc payante, ont pu se partager plus de 25 millions de Cfa. Sur ce point, le rapport dénonce le fait que sur trois années scolaires, depuis 2014, c’est 3 487 bourses (entières, demies ou de troisième cycle) qui ont été payées de manière indue à des étudiants inscrits en formation payante. Cela fait un montant de 1 milliard 805 millions 746 mille 323 francs Cfa.
Par ailleurs, 582 étudiants, ayant dépassé l’âge requis, se sont arrangés pour détourner plus de 85 millions de francs, tandis que 871 personnes, ayant redoublé plus d’une fois dans leur cycle d’études, ont pu bénéficier d’une cagnotte évaluée à 382 millions 709 mille francs Cfa. Dans tout ce nombre de délinquants, il ne faut pas oublier 131 fonctionnaires qui ont manœuvré pour avoir leur part de 85 millions 513 mille Cfa.
Cette grosse escroquerie qui ne date pas d’aujourd’hui, mais dont l’ampleur ne cesse de grandir, a pu avoir lieu du fait de plusieurs dysfonctionnements dont le rapport relève un bon nombre. Les inspecteurs du ministère de l’Economie, des finances et du plan indiquent que les autorités académiques ne maîtrisent pas le calendrier universitaire. En conséquence, impact négatif sur les délais de paiement et même sur les montants décaissés. Il y a aussi, parmi ces causes, «les retards récurrents concernant les inscriptions des étudiants boursiers, du fait des lenteurs dans la transmission à la direction des Bourses des résultats des examens et des listings des étudiants inscrits». De plus, la direction des Bourses n’est pas informée dans ces listes de la qualité des étudiants inscrits, entre les orientés par l’Etat et ceux inscrits en formation payante.
Plus grave, il y a la «présentation par certains étudiants de faux documents pour bénéficier des bourses sociales ou des aides de l’Etat». Il y a également «au niveau des régies compétentes pour les bourses des étudiants inscrits dans les établissements privés d’enseignement supérieur les aides et les subventions payées sans aucun contrôle de premier niveau ; la seule indication figurant sur les états de paiement concerne le numéro de la carte d’étudiant de l’intéressé ». fin de citation et sans commentaire.
Il faut également retenir qu’au-delà des questions financières qui mettent très souvent le feu aux poudres, il y a bien d’autres problèmes aussi important qu’il faut essayer de régler à tout prix si vraiment nous voulons rendre à l’enseignement supérieur et aux université Sénégalaises toutes leur crédibilité. Il s’agit de la maitrise du calendrier universitaire qui, depuis presque une décennie échappe à toute logique. Ne soyez pas en effet surpris que pour une licence qui normalement doit s’acquérir au bout de trois seulement, votre enfant étudiant passe près de cinq années à user sa culotte sur les chaises des amphithéâtres parce que tout simplement chaque année avant d’entamer ses études il est d’abord obligé de terminer l’année d’avant. Ce système propre aux universités Sénégalaises provoqué il faut le rappeler par les grèves récurrentes n’existe nulle part ailleurs. Il faut alors le corriger à tout prix pour l’intérêt de tous.
A ces problèmes s’ajoutent bien d’autres que nous ne pouvons pas développer ici. Il s’agit notamment de la maîtrise de la capacité d’accueil de nos universités qui aux départ se fixent des ambitions de limiter le nombre d’étudiants pour maintenir la qualité mais finissent toujours par dépasser largement leur capacité d’accueil. L’exemple de l’UGB est là pour illustrer cela car avec un effectif de 600 étudiants choisis parmi les meilleurs au départ, le campus de Sanar est devenu presque une ville avec une population estudiantine estimée à plus de 14.000 personnes. A qui la faute pourriez-vous vous demander. En guise de réponse on pourrait bien dire à tous, car si l’état peine à mettre en place une politique éducative offrant aux bacheliers de réelles possibilités d’orientation dans des filières de la formation professionnelle, ces derniers se font toujours remarquer par leur désir ardent de n’aller nulle part qu’à l’université pensant certainement que c’est la seule porte du salut. A côté il y a aussi les professeurs qui s’ils sont incontournables dans le systèmes figurent aussi en bonne place au banc des accusés à cause de leur grèves répétées mais aussi du fait que leur accompagnement fait aussi souvent défaut aux étudiants. Allez demander aux étudiants préparant leur mémoires le calvaire qu’ils vivent avant de mettre la main sur leur professeur encadreur.
Voyez-vous donc que ces évènements du 15 Mai dernier ont permis de poser les débats et les vrais débats, mais, il faudrait maintenant que cette réflexion soit, non seulement poursuivie mais qu’elle produise les conclusions escomptées et que celles-ci ne connaissent pas le même sort que celles des assises nationales et des assises de l’éducation.
Cheikh NDIONGUE reporter à Téranga FM
Correspondant du journal le quitodien
à Saint-Louis