CHEIKH OUMAR ANNE : « A la sortie de ces élections, l’opposition sera davantage divisée et affaiblie»

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Maire de Ndioum, le ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, décortique la situation politique nationale complexe liée aux investitures pour les locales dont il dit que tout renvoie le reflet des ambitions nationales des différents leaders. A travers cet entretien accordé à vox populi, Cheikh Oumar Anne assène des vérités crues, jette l’anathème sur l’opposition et ses leaders, prédisant ce qui les attend au soir de ces élections. Il ne manque pas de décliner son bilan à la tête de la mairie de sa municipalité.

La justice a corrigé les copies de plusieurs préfets et sous-préfets en réhabilitant les listes de YAW, cela n’accrédite-il pas les soupçons et accusations de parti-pris de l’opposition contre l’administration territoriale ?

Le dépôt des listes électorales obéit à une procédure législative et règlementaire. Elle sont déposées auprès des préfets qui, au regard, de leurs attributions, ont la possibilité de considérer les listes recevables ou non. Ils prennent des décisions motivées, et pendant la période contentieuse, les partis ou coalitions de partis ont la possibilité, comme c’est inclus dans la procédure de faire un recours auprès de l’autorité judiciaire qui est dans la procédure. Une évaluation doit se faire de façon globale sur toute la procédure. Est-ce que les listes déposées par les partis ou les coalitions de partis sont traitées à la lumière des textes ? C’est ce qui, à mon avis, aujourd’hui, est constaté. A partir de ce moment-là, aujourd’hui, tout le monde constate que la procédure est équitable. Pour moi, c’est toute la procédure de dépôt des listes qu’il faut analyser dans son entièreté, et le recours devant l’autorité judiciaire est un élément fondamental de ladite procédure. Ces recours, donc, permettent de rétablir les partis et coalitions de partis dans leurs droits. Ce qui veut dire que notre procédure est fiable et appliquée en respectant les intérêts de toutes les parties.

Comment analysez-vous la dispersion de l’opposition en perspective des élections locales ?

Je considère que les investitures dans ces Locales, avec une lecture fine, renvoient le reflet des ambitions nationales des différents leaders. Du côté de BBY, on a maintenu et renforcé le cheval électoral qui a toujours gagné en reconduisant dans l’investiture quasi intégrale des maires et Présidents de conseil départemental sortants. Et ça, c’est se mettre dans les dispositions de continuer à gagner les élections comme cela a toujours été le cas. C’était plus facile pour BBY, parce que l’objectif était clair et simple, continuer à être la première force électorale du pays. Et BBY s’est donnée les moyens de le faire.
De l’opposition, le problème s’est posé de la même façon, c’était de gérer à la fois le renforcement électoral de chaque coalition, mais aussi confirmer la place des différents leaders, cela veut dire de confirmer la légitimité du ou des leaders à briguer la magistrature suprême ultérieurement. Analysons ce que je viens de dire coalition par coalition. A Wallu, tous les leaders satellites du PDS triomphant des années 2000, ont plié bagages et ont laissé Wallu, parce qu’ils ont vu qu’en allant dans Wallu, ils renforcent le leadership de Karim Wade, et cela ne valait rien devant les quelques conseillers qu’ils glaneraient à gauche et à droite pour avoir une couverture nationale.
Pour Yewwi Askan Wi, la difficulté dans la gestion de l’élargissement de la base des deux principales formations politiques, à savoir PASTEF et Taxawu Senegaal, relevait de deux faits. Le premier, c’est qu’aucune des deux formations n’a exercé le pouvoir dans ce pays, ces 20 dernières années. Le second fait, c’est que les deux formations se disputaient le leadership de la même coalition dans laquelle elles sont.
Le fait de ne pas avoir exercé le pouvoir, ou de ne pas l’avoir exercé ces vingt dernières années, est une limite réelle pour la couverture du territoire national. Il était difficile pour chacune d’elles de trouver dans les 557 communes du pays, un leader crédible, c’est ce qui justifie qu’elles se soient retrouvées en coalition nationale. Mais la résultante négative de cette situation, c’est que dans toutes les localités où elles avaient chacune un leader crédible, c’était le conflit assuré. Et on a vu que les chefs de file de cette coalition ne pouvaient rien contre leurs bases. Cela a renforcé l’anarchie. Et pour parler comme les maoïstes, la contradiction principale dans chacune de ces formations, c’était que tous les leaders, Khalifa comme Sonko, voulaient se renforcer et éviter que de l’intérieur de leurs formations n’émergent d’autres personnalités qui pourraient, au moindre pépin, les enterrer, politiquement parlant. A Dakar, quand Sonko a compris que ce serait très difficile de prendre la place de Barthélemy Dias, il est parti sans grande conviction à Ziguinchor et il a semé la zizanie à Dakar. Et vous voyez, aucun leader de PASTEF connu, n’occupe une position éligible sur les listes de Dakar.
Pour Khalifa, en face de la légitimité historique pour Taxawu Dakar de conserver la mairie de Dakar, en son for intérieur, il lui était difficile d’admettre qu’une personnalité vienne occuper par les élections, la seule station qui a boosté sa carrière politique, la mairie de Dakar. Le choix n’étant pas facile, il a fait un calcul très pernicieux d’éliminer tous ceux qui avaient le même profil que lui, c’est-à-dire issu de familles dakaroises bon teint. En fin de compte d’ailleurs, il a choisi Barthélemy Dias en considérant que celui-ci n’aurait pas une légitimité nationale, parce que trainant comme lui, une affaire judiciaire. Donc, il ne peut pas lui faire ombrage ; ils gagnent ensemble ou ils perdent ensemble.
En gros, pour ces leaders de l’opposition, les résultats qu’ils auront dans ces élections, dépendront de leurs capacités à résoudre toutes ces contradictions qui se posent à eux. Et j’affirme qu’ils n’en ont pas les compétences. A la sortie de ces élections, l’opposition sera davantage divisée et affaiblie.

Comme vous l’avez dit, la grande majorité des maires a été reconduite comme tête de liste, à part quelques cas symboliques. Comment comprendre un tel fait et est-ce que ce n’est pas ça qui a créé des frustrations avec l’émergence des listes parallèles ?

J’ai dit tantôt qu’aujourd’hui, ce qu’il faut retenir, c’est que BBY a gagné toutes les élections depuis 2012 avec un dispositif qui, dans sa couverture nationale, reposait sur les leaders locaux, les maires, les Présidents de conseil départemental. Donc, la reconduction de ce dispositif est une logique transparente, c’est-à-dire une logique que tout le monde voit. On ne change pas un cheval qui gagne. Ce dispositif aussi performant soit-il, doit tenir compte, dans le cadre de ces élections locales, du fait que les maires sont élus au suffrage universel direct. Donc, toutes ces contradictions qui venaient après les élections du maire, avec notamment l’installation du bureau municipal, sont apparues au moment de la confection des listes. Je crois en la capacité de notre dispositif électoral à utiliser ses propres ressorts pour amortir les chocs. Parmi ces ressorts, on peut parler du leader de BBY, de la Conférence des leaders, des commissions de réconciliation et d’explication qui ont deux mois pour arrondir les angles et trouver des consensus très forts, à la mobilisation des bases qui, pour l’essentiel, sont des bases du président de la coalition, le Président Macky Sall.

Pensez-vous avoir ainsi déjoué les pièges du suffrage universel direct, le fameux raw gaadu ?

Oui je le pense réellement. Parce qu’en analysant tout ce qui a été fait jusqu’à présent, je pense que les décisions prises ont étalé un matelas qui va amortir ce choc du changement de mode d’élection, c’est-à-dire le raw gaadu pour BBY. Je voudrais tout simplement ajouter que, si l’élection du maire au suffrage universel a été une victoire de l’opposition, ses leaders qui ne regardent obstinément que 2024, lui ont fait perdre l’avantage que cela aurait pu lui procurer. A Dakar, l’opposition radicale a voulu rééditer les conditions des émeutes de mars dernier, Barthélemy Dias empruntant la même stratégie que Sonko.
Comment y réagissez-vous ?
Il y a un adage qui dit que l’histoire ne se répète jamais, sinon sous forme de tragédie. C’est avec insolence et indiscipline que ces leaders ont revendiqué à outrance, comme happés par un égocentrisme maladif, la paternité des évènements de mars qui, pourtant, sont des évènements qui se sont produits quasiment partout dans le monde, un mouvement d’humeur, à la suite des mesures inhabituelles pour lutter contre la Covid. Mais, «weddi guiss boku ci». S’ils voulaient mesurer leur influence sur les populations, particulièrement les jeunes du Sénégal, ils se sont faits une idée précise. Ce qu’il faut surtout condamner, devant l’échec de leurs manœuvres qu’on ne peut même pas qualifier de politiciennes, ils se sont attaqués physiquement aux forces de l’ordre, parce que dans leurs têtes, ils se croyaient supérieurs à tout ce qui représente l’Etat du Sénégal. Mal leur en a pris et vous avez vu que les records mondiaux du sprint ont été battus (rires). Si cela ne dépendait que de moi, les populations du Sénégal seraient descendues dans la rue pour apporter leur soutien à nos forces de défense et de sécurité pour leur professionnalisme et la défense de nos valeurs qu’on s’est librement choisies, cela veut dire celles républicaines. Tous ceux qui se mettront en travers de ces valeurs-là en tireront toutes les conséquences.

Le Fouta restera-t-il toujours le titre foncier du Président ?

Wait and see ! La question ne se pose pas à notre niveau. Rien n’a changé sous les cieux.

De quel bilan pouvez-vous vous prévaloir à Ndioum pour espérer faire full aux élections comme vous le clamez ?

Mon bilan, c’est la réalisation de mon programme. J’avais un programme ambitieux pour Ndioum et je l’ai réalisé. Ndioum est la première ville du Fouta.

Quels sont en déclinaisons concrètes la réalisation de ce que vous qualifiez d’ambitieux programme ?

Vous voulez les détails, allons y. Dans le secteur de l’éducation, Ndioum est devenue une ville universitaire avec le démarrage de l’ENO de l’université virtuelle du Sénégal. A deux reprises, une école primaire de Ndioum a été classée meilleure école du Sénégal. C’est sous mon mandat. Nous avons les meilleurs résultats de la région de Saint-Louis et cela le rôle de la mairie y a été pour beaucoup par la dotation d’outils didactiques aux élèves et aux instituteurs.
Sur le plan des infrastructures, le pont de Ndioum a été inauguré. Ce qui permet une circulation intégrale dans la ville à tout moment avec une connexion au Walo et au Diéry. Nous avons aussi bitumé 15 km de route. Nous avons renforcé le plateau technique de l’hôpital, la couverture sanitaire s’est fortement renforcée avec, à côté de l’hôpital et du dispensaire municipal, deux cliniques privées qui se sont installées. La couverture énergétique de la ville a été multipliée par 5.
Au plan économique, Ndioum a complètement changé de visage. D’une station-service, on est passé à trois, les enseignes se multiplient, les initiatives privées se développent, l’accès au crédit pour les jeunes et les femmes s’est fortement développé. L’accès à l’emploi des jeunes a connu un bond exponentiel. L’éclairage de la ville a été réglé, il reste tout simplement de suivre avec l’extension très rapide la ville en raccordant les nouveaux quartiers qui se créent. Nous allons démarrer la mise aux normes du stade communal, la construction d’un centre de formation professionnelle et la procédure de l’installation d’une partie de l’université Souleymane Niang à Ndioum.
A côté de cela, il y a le fonctionnement normal de la commune qui s’est renforcée et s’est bonifiée. Avec la campagne, vous verrez un bilan détaillé fait par les populations elles-mêmes, «Saabu du foot bopam».

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